FN: à la conquête de l'Ouest?

Depuis que Marine Le Pen a pris la tête du parti « Front National » en 2011 et engagé sa dédiabolisation, elle semble voler de succès en succès. Arrivée en tête des élections européennes en 2014 avec 25% des voix exprimées, elle a depuis réitéré ce score dans toutes les élections nationales et locales qui ont suivi. Aujourd’hui, non seulement les idées du FN sont de plus en plus acceptées au sein de la population française, mais son assise électorale, jusqu’à peu limitée au Nord, Nord-Est et Sud-Est de la France, s’étend vers l’Ouest et toutes les zones rurales (Centre). Déjà la Normandie semble avoir basculé dans son giron. Nantes et la Bretagne luttent toujours, mais pour combien de temps encore ?

Avant d’aborder la situation sur le terrain, et pour ceux qui auraient oublié ce qu’est le FN, cliquez Jean-Marie Le Pen, un gars du Morbihan voisin pour quelques petits rappels historiques et familiaux.

 

Comme on vient de le dire, jusqu’il y a peu encore, les cartes des terres d’élections du FN se superposaient presque exactement avec celles de l’immigration en France, du taux de chômage et des régions en pleine restructuration économique. Parti du Sud de la France et de la région PACA, le FN s’était progressivement installé en Alsace-Lorraine pour aller ensuite occuper le Nord-Pas de Calais, terre originellement communiste puis socialiste de part son industrie minière et sidérurgique.

La carte ci-dessous représentant la répartition des votes FN au premier tour des dernières élections présidentielles en 2012 où il avait emporté près de 18% des voix parle alors presque d’elle même. Présence massive dans les régions citées ci-dessus, et déjà un clair mouvement d’extension du FN vers le Centre et l’Ouest. La Bretagne et les Pays de la Loire étant épargnés.

La carte suivante, représentant la progression du FN commune par commune lors des élections européennes de 2014 (25% des voix, 23 sièges sur les 74 dont dispose la France au parlement européen) est alors encore plus éloquente, puisqu’on voit bien que le FN s’est quasi imposé dans les zones rurales (Normandie, Centre, Poitou-Charente, Aquitaine) jusque là non « touchées ». Dans ce contexte, et si la région nantaise semble résister de même que la plus grande partie de la Bretagne, il est intéressant de constater qu’une partie du Morbihan, département de naissance de Jean-Marie Le Pen et profondément rural, semble basculer…

Des constats qui s’appliquent avec récurrence, si l’on s’en tient maintenant aux résultats des votes au premier tour des élections départementales de mars 2015.

En Bretagne (données disponibles sans La Loire Atlantique) le score du FN au premier tour des élections départementales a été de 17,1 %. Le « score » moyen pour la France ayant été alors de 24,95 %, le FN se plaçant après l' UMP MAIS DEVANT le PS.

Dans le Morbihan, le FN a alors remporté 20,61 % des suffrages, 18, 99% dans les Cotes-d'Armor, 18,39% des voix en Ille-et-Vilaine et 15,73% dans le Finistère. Le score le plus élevé du FN en Bretagne a été remporté à Radenac, petit village du Morbihan, avec 45 % des suffrages. Par comparaison avec les élections européennes de 2014, l'évolution du nombre de voix dans la circonscription Ouest est passée de 76. 647 en 2009 à 525.851 en 2014! Soit a été multipliée par 8 !

Et les Nantais?

Au premier tour des dernières élections départementales en 2015, le binôme du PS Ménard et Touchefeu est certes arrivé en tête du premier tour avec 43,55 % des votes. Le binôme du FN Foy et Noël, lui, est cependant arrivé en deuxième place obtenant  17,19 % des voix. 

Les résultats du second tour étant clairement en faveur du binôme Ménard et Touchefeu du PS avec 76,27%. Avec 23,73 % de suffrages le FN a perdu le scrutin.

La plupart des Nantais ont résisté au programme populaire du FN. Ils ont donnés leurs suffrages au PS qui représente les valeurs du gauche. Le taux de chômage de cette ville en plein boom économique est de 8,4 %, soit en dessous de la moyenne en France - environs 11 %.

Mais on se demande pourquoi quand même 1/4 des électeurs ont voté pour le FN. Etait-ce un vote protestataire de premier tour comme partout ailleurs en France ? Ont-ils voulu exprimer leur mécontentement à l’égard du gouvernement socialiste parisien ou local ?  L’incapacité du PS à lutter contre le chômage des jeunes, qui à Nantes, atteint le même taux que partout ailleurs dans l’hexagone (25%) Peut-on expliquer ce vote par le commencement de la gentrification de la ville?

 

Toujours est-il qu’à Nantes et en Bretagne, le FN remporte toujours moins de suffrages que dans d'autres régions de l'Hexagone. Quelques données sociologiques permettent de l’expliquer : tradition catholique, haut niveau d'étude, absence de syndicats, politique modérée, distance à l'égard du centre, ouverture et curiosité au monde. Autant de facteurs qui font que ni les nantais ni les bretons ont tendance à voter pour le FN.

                                                              Hannah Windau et Natacha Thurow